Par Martin Savoie
Je vais vous confier quelque chose : Il y a certains sujets qui ne me sont pas des plus confortables, comme pas mal tout le monde d’ailleurs… Ai-je déjà eu à embarquer dans des impros qui traitaient de ces sujets? Oui. Parfois, ça marchait bien, je pouvais m’en sortir, mais parfois, l’esprit d’analyse prenait le dessus et j’étais, soit par ma perception du sujet ou ma connaissance de ce dernier, incapable d’embarquer pleinement dans l’improvisation en cours.
Avant que je ne le réalise, je me retrouvais avec un problème d’abandon.
Abandon, non pas dans le sens de baisser les bras, mais plutôt dans l’optique de se laisser aller complètement dans l’improvisation en cours et prêter les commandes de son être au personnage qui devrait évoluer à ma place dans l’univers créé.

Comment définir ce problème?
Les vétérans endurcis parleront de « joueur décroché », mais je pense qu’il y a une distinction claire à faire entre les deux concepts. Pour l’exercice, je crois que l’on serait mieux de parler de « joueur désengagé ».
« Jouer de façon désengagée » serait jouer sans s’abandonner entièrement à l’improvisation. Le joueur désengagé, au lieu de montrer une réaction émotionnelle au contenu proposé (comme ce serait le cas avec le joueur décroché), aura presque l’air de le remettre en question, montrant un manque d’investissement vis-à-vis le contenu proposé, avançant dans l’univers proposé d’un pas hésitant.

Les raisons pour lesquelles un joueur est désengagé sont multiples, mais peuvent se regrouper dans deux grandes catégories : le manque de connaissances et les préférences personnelles.
Le manque de connaissances, c’est un peu un défaut de culture. C’est devoir composer avec un sujet que l’on connaît peu ou pas, et où la conscience de ce manque nous retient. Sachant qu’il y a un manque de connaissances de notre part, une peur que nos propositions pourraient être contre-productives, voir destructrices, peut s’installer.
Dans le cas des préférences, il se peut que l’on n’est tout simplement pas à l’aise avec le sujet, la façon de l’aborder et que, par conséquent, on sent en cours de route que l’on n’a pas notre place dans l’improvisation en cours et que notre raison influencera négativement l’histoire racontée. Ce malaise peut se manifester pour des raisons multiples, propres à chaque individu.

On ne se le cachera pas, le jeu désengagé est un problème difficile à régler, principalement parce que le problème d’abandon ne se manifestera pas dans le jeu général de l’improvisateur, mais plutôt à certains moments, lorsqu’un sujet ou un style spécifique fera surface, et ce n’est qu’après y avoir fait face que l’on peut en prendre pleinement conscience et travailler dessus. Que ce soit en se renseignant sur le sujet ou en trouvant une façon de l’aborder qui nous rend plus à l’aise, c’est un problème qui peut se régler.
Et même si l’on ne fera peut-être jamais face à ce sujet à nouveau, au moins, les balises d’une solution, une démarche pour trouver les thèmes qui nous posent problème est déjà en cours, l’effet domino se mettra en branle et d’autres se régleront par nos recherches, tant académiques que personnelles.
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