Par Michel M. Albert

Comme je disais dans le titre, je regardais un film muet l’autre soir et ça m’a frappé (NOUS a frapper, j’étais pas tout seul, dans le silence) que ce drame, à propos d’un mariage qui s’effondrait, qui est presque tourné à la tragédie avant que les deux personnes renouent leurs affections, se redécouvrent l’un l’autre et leur amour (Sunrise de F.W. Murnau), utilisait des techniques fort pertinentes en sans sons/sans paroles que nous, les improvisateurs, sous-utilisions.

C’était un drame, avec très peu de texte en intertitres, et sans les culbutes que l’on imagine en pensant au cinéma muet de Chaplin ou Keaton. Le narratif reposait plutôt sur l’expression faciale. Un peu exagérée, peut-être, mais raisonnablement vraie, et sur les visages des comédiens, on comprenait tout.

La tristesse, la démence, la culpabilité, l’espoir, le pardon, le bonheur, la peur, et toute une relation esquissée en simples expressions et attitudes physiques.

Pourquoi on ne fait pas ça en impro? Dans les libres, on parle et on parle et on parle. On n’aime pas trop le silence, lui qui est parfois puissant. Pourtant, on pourrait en dire autant avec notre posture et notre visage. Dans les improvisations mimées, on fait des choses, des petites routines, des manipulations d’objets, on se tire d’un côté et de l’autre. Là aussi, on pourrait plutôt jouer sur l’émotion, vivre quelque chose plutôt que de faire quelque chose. Ça m’a donner des idées de musicales aussi, où l’on suivrait le ton, plutôt que le rythme, de la musique.

Avec plusieurs joueurs en scène, en plus, c’est beaucoup plus facile de lire une expression que de comprendre la mimique de quelqu’un qui… construit un mur? Plante un jardin? Conduit un bateau? Je ne saisie pas bien ton geste, là, ami joueur.

Et la preuve de cela nous a été révélée dans ce vieux film. Si les comédiens nous ont fait tout comprendre, si on s’est investi dans leur histoire au point où on criait après l’écran pour que des malchances ne leur arrivent pas, avec un minimum de texte qui n’était même pas, à notre avis, nécessaire à la compréhension, eh bien, des improvisateurs peuvent aussi réussir l’exploit. Si seulement pour changer l’air.

Datant de 1927, Sunrise est dans le domaine public. Visionnez-le vous-même sur YouTube et vous verrez de quoi je parle.

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