Ouvrir ses horizons

Par Michel M. Albert

Petite histoire sans les noms des participants :

J’arbitre une improvisation mixte dont le thème mentionne Venise. Un joueur invite l’autre à aller nager – ben oui, dans le canal qui est sans doute devant eux – mais l’autre ne veut/peut juste pas comprendre et n’arrête pas d’essayer d’amener l’action à une piscine. En d’autres mots, le deuxième joueur dans notre histoire n’a aucune idée de ce qui est remarquable à propos de Venise, une ville où les rues sont des canaux. (Alors pour les autres caractéristiques de cette ville italienne, comme sa place dans l’histoire de l’art, etc., on s’en passera.)

Je raconte ceci pour illustrer l’importance d’ouvrir ses horizons si on est improvisateur. Pour mieux comprendre et s’attaquer aux thèmes, pour mieux travailler avec les joueurs qui collaborent à notre histoire, et pour présenter quelque chose de différents à nos publics.

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Le manque d’ouverture au monde extérieur à notre expérience personnelle mène à deux défauts en improvisation. Le premier, c’est que toutes les impros viennent à se ressembler. Elles se passent dans les mêmes lieux (l’école, le bureau, le vide) avec les mêmes personnages, plus ou moins dans les mêmes sortes d’histoire. L’autre défaut survient quand un arbitre, ou l’équipe adverse, essaie de forcer le monde extérieur sur l’impro (comme dans l’exemple ci-haut), mais les joueurs n’ont pas les connaissances nécessaires pour interpréter ce qui se passe. Ça donne des impros absurdes où rien n’est vrai ni logique, où la réaction du public est « ils ne connaissent rien au sujet abordé » (ce qui n’est pas idéal).

Il est donc important pour l’improvisateur de s’éduquer, de S’INTÉRESSER à non seulement ce qui est autour de lui, mais aussi à L’EXTÉRIEUR de ses chemins bien battus. Les trois éléments de base de chaque improvisation devraient être couverts. Les lieux, en s’informant sur différents pays, leurs cultures, leurs traditions, leur histoire, leurs villes et lieux touristiques; les personnages, en découvrant des professions, des différents groupes d’âge, des philosophies et façons de vivre; et les histoires, en consommant par la voie de nos médias préférés (que ce soit écriture, cinéma, bande dessinée, jeu vidéo, théâtre, etc.) des narratifs et portraits de tous genres, tons, styles et structures. Le tout va ensuite dans notre blender mental et sort de façon toute personnelle dans nos spectacles, mais une vision personnelle ENRICHIE par la consommation de PLUS que notre quotidien ordinaire.

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L’entraîneur d’une équipe peut encourager ses joueurs en donnant des devoirs, animant chaque pratique d’une présentation sur un endroit, un personnage, une histoire, issus de la recherche de la semaine. Les exercices peuvent ensuite être bâtis autour de cet élément. Voyons ce qu’aurait l’air une bonne impro à Venise (ou dans les forces armées canadiennes, ou dans le style de Molière, etc.). Mais le joueur ne devrait pas attendre de se faire demander. Il devrait toujours être à la recherche de choses qu’il peut insérer dans son spectacle, pour être original, pour garder le public intéressé, pour mieux relever les défis de l’arbitre et de ses adversaires.

Et on s’entend, ça ne prenait pas grand-chose pour réussir l’improvisation à Venise. En d’autres mots, on n’a pas besoin d’écrire un projet de 10 pages sur un endroit pour comprendre ce qui le rend intéressant en impro. Une ligne peut faire l’affaire. Nous n’avons pas d’excuses comme dire qu’on n’a pas le temps, surtout dans l’ère d’Internet. Ouvrons nos esprits, étendons la portée de nos connaissances, et sortons du « ici et maintenant » dans lequel tellement d’improvisations semblent prises.

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