Par Michel M. Albert

Avant l’impro-match, il y avait tout de même l’improvisation.

Son histoire est vieille comme la présence de l’être humain sur Terre. On la trouve dans les rituels primitifs jusqu’aux manifestations théâtrales d’aujourd’hui. Toutes les formes d’art ont, en fait, commencé avec l’improvisation. Quand on pense aux poèmes épiques de la Grèce antique, comme l’Iliade et l’Odyssée d’Homère, ceux-ci ont vu le jour d’abord comme des histoires improvisées, auxquelles le poète-raconteur ajoutait du matériel avec chaque performance.

Le chant, la danse, les premiers moments de théâtre, ont d’abord été improvisés. Une fois qu’on a inventé quelque chose dans une forme prototype, on peut ensuite broder, améliorer et mettre quelque chose en mémoire ou sur papier (une fois que le papier est inventé). Mais ce premier jet – et c’est vrai d’un artiste qui travaille aujourd’hui – est une improvisation.

De façon plus directe, on a continué à utiliser l’improvisation pour supplémenter la comédie dans des formes de théâtre itinérant, en particulier la commedia dell’arte en Italie, ces performeurs jamais trop esclaves du mot écrit. Certes, on jouait des pièces mémorisées, mais on débarquait du texte pour s’amuser, ajouter, incorporer le public ou la région où on jouait.

Et aujourd’hui, au-delà des spectacles d’improvisation (que l’on parle de l’impro-match, ou autre), on retrouve l’impro dans une gamme de domaines. Les comédiens en apprennent les base pour créer des personnages plus vivants et savoir mieux se débrouiller lors d’imprévus. Certains travaillent même des idées complètement en improvisant pour écrire les bases de la pièce en écriture, et ensuite la raffiner. Le jazz est de l’improvisation musicale, donc ça ne se limite pas au « théâtre ». Les entreprises utilisent aussi l’improvisation pour développer le travail d’équipe. Les enseignants improvisent en classe pour rendre la matière plus intéressante. Faire du role-playing en psycho-thérapie, c’est de l’improvisation. Et puis, le jeu d’enfant aussi, s’en est.

Parce que après tout, l’improvisation c’est naturel comme respirer. Personne ne planifie sa journée à la ligne près. Nous sommes constamment en train de nous adapter aux circonstances changeantes autour de nous, en train de dire la première chose qui nous passe par la tête, en train de faire des remue-méninges avec nos collègues, en train de rêver et imaginer et penser à de nouveaux projets… Et à chaque fois qu’on a une nouvelle idée, dans ce moment-là, on improvise, et c’est comme ça qu’on progresse comme individu, comme société… et comme espèce.

Donc il serait vrai de dire que l’histoire de l’humanité, ou du moins celle de l’art, c’est l’histoire de l’improvisation.

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