Entre temps et lieux

Par Isabel Goguen

En improvisation, on n’a pas besoin d’une machine pour voyager dans le temps. Les joueurs sautent d’un moment à l’autre dans l’histoire en utilisant des transitions. Celles-ci permettent aux joueurs de glisser entre deux temps, deux lieux, deux situations, lors d’un seul flash-back vers le passé d’un personnage, ou a multiples reprises pendant le cours de l’improvisation. Mais comment peut-on rendre ce changement soudain clair? Est-ce que le public comprendra? Explorons nos options…

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Transition sous-titre
Aucune crainte que le public ne saisirait pas ce type de transition! Ici, on voit les joueurs dire à voix haute vers quel temps ou lieu on se lance, typiquement accompagné d’un mouvement de mains qui semble indiquer que le texte apparaît également à l’écrit au niveau de sa taille ou au dessus de sa tête. Bien que les « 3 ans plus tard » et les « pendant ce temps, en ville » peuvent être utiles, ce n’est pas une transition particulièrement subtile, et pourrait facilement être à contre-ton dans le cas de certaines improvisations.   

Transition dynamique
Parfois combinée avec la transition sous-titre, la transition dynamique est également très évidente. Typiquement, les joueurs soulignent le changement de scène avec des mouvements de bras dans toutes les directions en tournant sur place, tout en accompagnant ceux-ci d’un son du style « Wouuuuwouwouwou ». C’est une approche qui peut absolument avoir sa place dans une improvisation loufoque ou exagérée, mais qui ne cadre pas dans toutes les sortes d’improvisations. Elle est amusante, humoristique, mais encore une fois, vraiment pas subtile.

De la même façon, la transition en se baissant et se relevant, utilisant la position neutre pour effectuer le changement, se veut une transition dynamique, mais pas très dynamique. Elle est même un peu plate, bien que assez claire.

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Transition physique
Une façon efficace de marquer le déplacement entre deux temps ou lieu visuellement est la transition physique. Dans ce cas, on utilise le mime comme outil principal pour signaler le changement. Le joueur peut d’abord établir un mouvement, puis sans le modifier, changer son contexte. Par exemple, un joueur se lance vers un coin de l’arène et couvre ses yeux de ses mains en pleurant. Par la suite, il crée la transition en gardant le mouvement tel qu’il est et en commençant à compter comme s’il joue à cache-cache. On a changé le contexte, et ainsi l’interprétation du mouvement. 

Il est également possible de débuter un mouvement puis faire une transition vers un mouvement similaire en lien avec la scène d’un autre temps. Par exemple, un personnage a faim et donc s’étire le bras vers le haut pour atteindre une armoire dans sa cuisine. Avant de prendre une boîte de céréales, le joueur change un peu son mouvement afin de mimer une personne qui grimpe une montagne, peut-être pour se trouver de la nourriture dans la nature. Les deux mouvements sont semblables et peuvent facilement se fondre l’un dans l’autre. 

Transition verbale
Un mot ou une parole peut également servir comme outils de transition. Comme avec le mime, on peut identifier la transition entre deux scène en changeant le contexte de l’intervention verbale, dans ce cas avec la répétition. Par exemple, « Entre moi et toi, je ressens une passion, un feu! » puis, en panique « FEU! FEU! La maison est en feu! ». Le mot feu n’est pas exprimé avec la même émotion, ni la même intention, afin de souligner le début de l’autre scène. Il peut être également très intéressant de jouer avec des mots ayant différents sens comme par exemple :  d’une voix inspirée « Je m’en vais vers » puis, très ennuyé, « verre de jus? ». 

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Mais pourquoi a-t-on besoin de transitions?

Transitions qui sauvent du temps
Parfois, pour le bien de l’improvisation, on saute les bouts plates. Si la marche vers l’épicerie n’est pas centrale à l’histoire, ou on ne veut pas attendre 3 semaines pour la grande bataille, on se lance directement vers la partie la plus intéressante et pertinente de notre improvisation. La transition permet de sauver du temps afin d’explorer le maximum de son idée lors de ces précieuses 3 minutes.

Transitions qui créent du mystère et du suspense
Une improvisation commence avec des personnages qui dépensent beaucoup d’argent. Puis on fait des transitions alternant régulièrement entre cette scène et les mêmes personnages dans un entrepôt sombre. Comment sont connectés ces deux moments dans la vie des personnages? Comment l’un affecte l’autre? Quel est le fil conducteur entre les deux scènes? On ne sait pas! Mais on le découvre peu à peu. Chaque fois qu’on alterne entre les scènes, on a des nouveaux morceaux du puzzle jusqu’à ce qu’on élucide le mystère! 

Lorsqu’on s’amuse avec la structure d’une improvisation en changeant sa chronologie ou en migrant entre deux scènes, on crée du suspense. Le public se pose des questions et réfléchi à l’improvisation. Bien qu’il y aura peut-être quelques spectateurs perdus ici et là lors de la première transition, il faut faire confiance au public. C’est justement ce qu’il ne sait pas qui le garde attentif et engagé à l’histoire. Et quelle expérience à donner à son public lorsque le moment arrive où tout fait du sens!

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