Par Michel M. Albert

Quand j’ai commencé mon improvisation universitaire, un des exercice que nous faisions en pratique était le jeu de confiance. On se laissait tomber vers l’arrière et nos coéquipiers nous poignaient avant qu’on se fasse mal. Entouré d’improvisateurs, on jouait la bouteille humaine, tombant du côté, du devant, ne jamais ajustant nos bras ou jambes pour s’attraper soi-même, en pleine confiance que notre équipe ne nous laisserait pas tomber.

Y prenant plaisir, c’est devenu un peu mon truc cette première année là – me laisser tomber vers l’arrière où il n’y avait personne pour m’attraper sauf peut-être un tapis bleu de gymnase. Je ne pense pas que c’était le but de l’exercice et aujourd’hui, je me sens très courbatu.

Alors quel EST le but du jeu de confiance et est-il utile en improvisation?

C’est un outil qui nous vient du théâtre traditionnel pour être ensuite adopté par les ateliers de construction d’équipe (team-building). L’idée est de représenter l’idée que travailler avec une équipe implique une confiance implicite en ses coéquipiers. Je m’assure que tu ne tombes pas, et c’est aussi vrai sur la glace. Si t’as de la difficulté dans une impro, je suis là pour t’aider. Si tu te casses la gueule, je suis là pour t’encourager. Tu as confiance en moi de ne pas te juger, de ne pas te disputer, de ne pas t’abandonner, de ne pas dérailler ton idée.

C’est une belle image, et effectivement il est très important de faire confiance et de POUVOIR faire confiance à son équipe. Malheureusement, les études démontrent qu’il n’y a pas vraiment de lien entre la confiance bâtie dans l’exercice et la confiance ensuite démontrée par l’équipe dans son contexte normal! En d’autres mots, un coéquipier peut bien vous empêcher de tomber pendant le jeu de confiance, mais ça ne veut rien dire une fois sur la glace.

Ni, probablement, que la capacité d’un joueur de se laisser tomber dans la vide est une indication qu’il sera capable de plus purement improviser, de « laisser aller » le caucus, etc. une fois en jeu. L’exercice nous enseigne à faire l’exercice, et on ne peut pas nécessairement transférer ses leçons à d’autres activités.

Il nous reste tout de même le symbole. Faire un jeu de confiance dans une pratique tôt dans l’année donne un point de référence aux joueurs, que l’entraîneur, par exemple, peut utiliser pour ramener son équipe à l’ordre. « N’oubliez pas de vous faire confiance, » évoquant comment ils ne se sont pas laissés tomber lors du jeu. Il ne faut pas cependant croire que c’est tout ce qu’on a à faire pour renforcer les liens entre les membres de son équipe.

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