Par Justin Guitard
Dans le fil de commentaires sous l’article du 10 août dernier, écrit par Daniel Ouellet, et intitulé Que nous disent les stats?, Daniel et moi avons entamé une discussion sur les statistiques en improvisation. Je mentionnais avoir une formule particulière pour calculer l’apport d’un joueur à une équipe. Et aujourd’hui, je vous présente cette formule, un peu complexe je l’avoue.
À priori, il faut mentionner qu’on cherche ici à identifier le joueur le plus utile. Ce prix, en tournoi secondaire et dans les différents réseaux au Nouveau-Brunswick, est remis au joueur qui possède le meilleur apport. L’Apport est un calcul qui prend en compte les improvisations jouées (que le joueur les ait gagnées ou perdues), les improvisations remportées ainsi que les punitions (négativement pour cette dernière statistique). Le joueur avec le plus haut pointage est déclaré joueur le plus utile, ce qui voudrait dire, techniquement, qu’on considère comme joueur le plus utile dans une équipe le joueur ayant joué beaucoup d’improvisations, remporté plusieurs improvisations et ne pas avoir reçu trop de punitions.
De mon côté, j’ai d’autres critères, tant objectifs que subjectifs, qui me permettent de déterminer qui est mon joueur le plus utile et quel est le rang d’utilité de chacun de joueurs dans mon équipe. Évidemment, tout cela demeure statistique, mais ça, c’est une autre pleine discussion.
Je tente de vous vulgariser le plus simplement possible ma formule.
Tout d’abord, durant un match d’improvisation, je recueille deux types d’informations supplémentaires à celles habituelles, que je classe dans deux catégories : objective et subjective.
La catégorie objective
Je donne 1 point au joueur (je l’indique avec un code de lettres sous le numéro du joueur sur ma feuille de match) chaque fois qu’il :
- Entre dans une improvisation comme moteur (code M)
- Entre faire un personnage (code Pe)
- Entre dans une catégorie (code Ca)
Ce sont trois éléments que je considère, comme entraîneur, comme étant utiles à mon équipe.
Le moteur sera le personnage principal de l’improvisation, il prendra le lead. Les personnages sont un des critères que les juges de salles observent, donc c’est utile d’en faire. Les catégories sont une particularité (et une difficulté) d’un match, j’ai donc besoin de joueurs habiles dans ce domaine.
Aussi, je donne le point peu importe la qualité de l’improvisation (ex. même si le joueur a mal joué ou perdu la catégorie, il aura le Ca sous son nom peu importe). Je m’occuperai des improvisations gagnées plus loin.
Je comptabilise les trois codes dans la même colonne, soit la colonne O.
La catégorie subjective
Je donne 1 point au joueur (je l’indique aussi avec un code de lettres sous le numéro du joueur sur ma feuille de match) chaque fois qu’il :
- Fait un punch que la foule a particulièrement trouvé drôle ou que j’ai particulièrement aimé (code Pu)
- A fourni une idée, soit en caucus, soit pendant le match, qui était utile (code I)
- A fait avancer l’histoire de manière importante (H)
Ce sont, là aussi, trois éléments que je considère comme utiles. Bien sûr, il y a cette fois un côté subjectif, comme un entraîneur pourrait trouver qu’un joueur n’a pas fait avancer l’histoire, alors qu’un autre dirait le contraire. Même chose pour l’idée ou le punch. C’est pourquoi c’est la section subjective.
Pour le punch, dans une ligue compétitive où le public a une partie ou la totalité du vote, ça demeure tout de même un élément important, même si on s’entend pour dire que de l’improvisation, c’est pas juste des blagues.
J’aime donner des points pour les idées, parce que ce n’est pas quelque chose que le public voit d’un joueur dans un match, mais un joueur peut avoir une grande utilité sur le banc.
Je comptabilise les trois codes dans la même colonne, soit la colonne S.
Pour l’instant, ça donne ça (avec des noms de joueurs fictifs) :
| Nom du joueur | Nombre de matchs | M | Pe | Ca | TOTAL O | RANG | Pu | I | H | TOTAL S | RANG |
| Julie | 5 | 4 | 2 | 9 | 15 | 3 | 1 | 11 | 4 | 16 | 4 |
| Joline | 5 | 5 | 3 | 2 | 10 | 6 | 6 | 4 | 3 | 13 | 6 |
| Jocelyne | 5 | 8 | 6 | 3 | 17 | 2 | 9 | 5 | 2 | 16 | 4 |
| Josée | 5 | 2 | 5 | 8 | 15 | 3 | 5 | 9 | 6 | 20 | 2 |
| Jules | 5 | 8 | 2 | 4 | 14 | 5 | 7 | 2 | 8 | 17 | 3 |
| Jordan | 5 | 11 | 8 | 5 | 24 | 1 | 7 | 5 | 9 | 21 | 1 |
| Jimmy | 5 | 2 | 1 | 6 | 9 | 8 | 7 | 4 | 2 | 13 | 6 |
| Jack | 5 | 3 | 2 | 5 | 10 | 6 | 2 | 6 | 3 | 11 | 8 |
Je classe ensuite les joueurs en ordre de rendement, de 1 à 8.
Les 6 éléments suivants me permettent de calculer avec plus de précision l’utilité d’un joueur dans l’équipe. Un entraîneur pourrait choisir de cibler d’autres éléments, tout dépendamment.
Mais, dans un niveau compétitif, un joueur peut-être aussi bon qu’il soit, on se posera tout de même la question comme entraîneur : gagne-t-il ses improvisations? Il faut que ça clique aussi avec le public, donc, pour cette raison, j’ajoute un 3e calcul dans le tableau, c’est-à-dire la MOYENNE d’improvisations gagnées (et non pas l’apport). Je classe aussi les joueurs selon leur rang.
| Nom du joueur | Nombre de matchs | M | Pe | Ca | TOTAL O | RANG | Pu | I | H | TOTAL S | RANG | Moy. | Rang |
| Julie | 5 | 4 | 2 | 9 | 15 | 3 | 1 | 11 | 4 | 16 | 4 | 60% | 5 |
| Joline | 5 | 5 | 3 | 2 | 10 | 6 | 6 | 4 | 3 | 13 | 6 | 55% | 6 |
| Jocelyne | 5 | 8 | 6 | 3 | 17 | 2 | 9 | 5 | 2 | 16 | 4 | 71% | 3 |
| Josée | 5 | 2 | 5 | 8 | 15 | 3 | 5 | 9 | 6 | 20 | 2 | 78% | 1 |
| Jules | 5 | 8 | 2 | 4 | 14 | 5 | 7 | 2 | 8 | 17 | 3 | 40% | 7 |
| Jordan | 5 | 11 | 8 | 5 | 24 | 1 | 7 | 5 | 9 | 21 | 1 | 77% | 2 |
| Jimmy | 5 | 2 | 1 | 6 | 9 | 8 | 7 | 4 | 2 | 13 | 6 | 35% | 8 |
| Jack | 5 | 3 | 2 | 5 | 10 | 6 | 2 | 6 | 3 | 11 | 8 | 68% | 4 |
Je prends ensuite les trois colonnes des RANGS et je fais un total. Je reclasse ensuite les joueurs du plus petit score (1er) au plus grand score de rangs (8e).
| Nom du joueur | RANG O | RANG S | Rang M | Total | Rang final |
| Julie | 3 | 4 | 5 | 14 | 4 |
| Joline | 6 | 6 | 6 | 18 | 6 |
| Jocelyne | 2 | 4 | 3 | 9 | 3 |
| Josée | 3 | 2 | 1 | 6 | 2 |
| Jules | 5 | 3 | 7 | 15 | 5 |
| Jordan | 1 | 1 | 2 | 4 | 1 |
| Jimmy | 8 | 6 | 8 | 20 | 8 |
| Jack | 6 | 8 | 4 | 18 | 6 |
J’arrive donc avec un rang d’utilité à l’équipe. Je pourrais donc déterminer dans le cas suivant que Jordan est mon joueur le plus utile et que Jimmy est mon joueur le moins utile.
Aussi, si les joueurs jouent dans plus d’une ligue (dans mon cas, mes joueurs jouent dans trois ligues différentes, la ligue scolaire, la ligue interscolaire et la LIO), je peux faire le calcul pour les trois ligues et reclasser mes joueurs pour une meilleure précision (ex. un joueur qui est un élève populaire peut exceller devant l’école parce que le public est composé de ses amis, mais une fois dans une autre ligue sans son public, il peut devenir beaucoup moins fort statistiquement), donc j’ai le même gros tableau pour les trois ligues et je garde seulement la dernière donnée (le rang final de chaque tableau) pour ce dernier calcul :
| Nom du joueur | RANG ÉCOLE | RANG INTER | Rang LIO | Total | Rang final |
| Julie | 4 | 3 | 1 | 8 | 3 |
| Joline | 6 | 5 | 6 | 17 | 6 |
| Jocelyne | 3 | 4 | 4 | 11 | 4 |
| Josée | 2 | 2 | 3 | 7 | 2 |
| Jules | 5 | 6 | 5 | 16 | 5 |
| Jordan | 1 | 1 | 2 | 4 | 1 |
| Jimmy | 8 | 8 | 8 | 24 | 8 |
| Jack | 6 | 7 | 7 | 20 | 7 |
Je me retrouve donc avec un ordre de joueurs selon leur utilité. Si j’avais à en choisir 6 pour jouer dans un tournoi, par exemple, je pourrais me dire que mon meilleur alignement serait composé de Jordan, Josée, Julie, Jocelyne, Jules et Joline. Jimmy et Jack seraient mes joueurs 7 et 8.
Bien sûr, il y a des impondérables qui viennent en ligne de compte avant de faire un choix (ex. le joueur 7 ou 8 est le capitaine, un expert d’une catégorie en particulier, mon leader positif, mon joueur d’énergie, ou un vétéran de 12e année qui a de l’expérience; ou alors un des joueurs du top 6 a une mauvaise attitude, ou a manqué beaucoup de pratique, etc.) mais, somme toute, ce tableau me donne un portrait assez global de l’utilité de chacun.
Quelques précisions :
Si les joueurs n’ont pas joué le même nombre de matchs, je calcule le total de RANG O et de RANG S, divisé par le nombre de matchs.
Il est possible de ne pouvoir retenir que certains éléments du calcul dans certaines lignes (ex. si j’arbitre, je ne peux pas comptabiliser en même temps les statistiques de rang S).
Conclusion
Dans le fond, pour moi, ce calcul est beaucoup plus précis pour calculer l’utilité d’un joueur, même s’il demeure plus long et plus complexe. Les étoiles, les punitions et l’apport sont exclus de mes statistiques avancées, mais je les consulte tout de même lorsque j’analyse les statistiques.
Les statistiques demeurent une aide et non pas une finalité. Il y aura toujours des anomalies statistiques et j’écoute souvent plus mon cœur que mes statistiques… mais parfois, quand il faut prendre une décision crève-cœur et trancher entre deux joueurs qui méritent également de jouer, les statistiques peuvent nous donner une perspective éclairante.
Aussi, j’ai choisi 6 critères qui, selon moi, se comptabilisent facilement durant un match (moteur, personnage, catégories, idée, histoire et punch), mais ne représentent pas nécessairement selon moi TOUTE l’utilité d’un joueur. Cependant, certains critères seraient plus complexes à calculer ou même à comptabiliser tout en étant sur le banc durant un match.
Et, ce qui est bien avec ça, c’est que je peux cibler les forces et les défis de chaque joueur (tel joueur fourni beaucoup d’idées, mais entre peu en moteur, par exemple; je peux donc travailler avec le joueur pour qu’il réalise lui-même certaines de ses idées dans l’arène). C’est probablement la plus grande utilité au niveau secondaire, encore plus que de simplement classer les joueurs en ordre d’importance, parce que comme entraîneur, je les aime tous de manière égale… mais les chiffres, eux, ont des préférés. 😛
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