Par Michel M. Albert
Dans la communauté d’improvisation canadienne-française, on parle du « OUI » dans des termes absolus. Qu’en impro, il faut dire « OUI » à toute proposition qui nous est offerte. Mais on a tous déjà été dans des situations où cette proposition est peu inspirante, voire clichée, ou même destructrice. Mais « OUI » ne veut pas dire « JE TE SUIS ». « OUI » veut dire « J’ACCEPTE QUE CE QUE TU VIENS DE DIRE OU FAIRE EST VRAI DANS L’UNIVERS DE L’IMPRO ». En d’autres mots, on peut y réagir de différentes façons. On ne peut tout simplement pas l’IGNORER.
Est-ce que le « Yes, and » de l’improvisation anglophone est plus utile? « OUI, ET… » est effectivement plus proche de ce que l’ont veut dire quand on parle du « OUI », car il ne s’agit pas seulement d’accepter ce qui nous est proposé, mais d’y AJOUTER. Il faut construire en tandem pour monter une bonne improvisation. Ce n’est pas assez de laisser l’autre joueur tout bâtir alors qu’on hoche la tête. Mais même « OUI, ET… » est un portrait incomplet.
Il y a, en fait, quatre réactions possibles à une proposition :
OUI, ET… On accepte ce que l’autre nous donne et on l’amène à un niveau plus élevé. Créons un exemple où un joueur propose d’aller cambrioler une maison. « Oui, et… j’ai amené des cordes, des cagoules, un diamant pour couper un trou dans la fenêtre… »
OUI, MAIS… On accepte ce que l’autre nous donne, mais on ajoute un obstacle qui rendra la réussite de la proposition plus difficile. Dans notre exemple : « Oui, mais… regarde, ils ont un gros chien dans la cour! »
NON, MAIS… On accepte que le personnage ait cette proposition en tête, mais on fait une contre-offre qui se veut un compromis entre leur proposition et notre idée. Le TYPE d’histoire reste sensiblement le même. Dans notre exemple : « Non, mais… Cette maison-là n’a rien d’intéressant. Si tu es un cambrioleur, est-ce que je peux t’intéresser à la récupération du chien que mon ex refuse de me redonner? »
NON, ET… Il s’agit encore d’une déviation de la proposition, mais dans ce cas-ci on rejette le type d’histoire tout en gardant le personnage et la motivation proposés. Dans notre exemple, donc : « Non, et… je suis policier undercover, et tu es en état d’arrestation! » L’improvisation pourrait alors devenir un interrogatoire, une pourchasse, etc., selon la réaction à CETTE proposition.
Par exemple : « Oui, et tu m’as bien eu, amène-moi au poste de police. » « Oui, mais tu ne me pogneras pas si facilement (courre). » « Non, mais… est-ce que je peux te tenter avec des promesses de richesse si tu m’aides? » « Non, et… moi aussi je suis un policier undercover, je pensais TE pogner, haha, allons trouver un vrai voleur. » Ce qui mène à une autre réaction, et une autre, et une autre, jusqu’au sifflet.
Un atelier de construction
Un bon atelier de construction à faire en équipe est de donner une proposition au groupe, puis de demander aux participants de décider de la suite avec chacune des quatre réactions. L’entraîneur peut enchaîner différentes propositions, ou renchérir sur une ou plusieurs des propositions offertes par les joueurs jusqu’à la fin de l’histoire. Le groupe peut ensuite évaluer quelle réaction est la meilleure pour une proposition donnée, laquelle mène à quelque chose de plus original, et laquelle est un cul-de-sac qui freine l’histoire, et ainsi développer de bons réflexes de construction.
Vous voulez écrire un article? Communiquez avec nous à improvisationnb@gmail.com!

