Le refus de la retraite : Une vie dédiée à l’improvisation

Par : Eric Tornado Lavoie

Il y a des moments dans la vie où l’on croit que la retraite est la prochaine étape logique. Après plus de 25 ans à coacher l’improvisation au niveau secondaire, j’ai pensé à plusieurs reprises qu’il était temps d’accrocher mon gilet d’improvisation et de laisser ma place à la prochaine génération. Mais chaque fois que j’essaie de m’éloigner, quelque chose me ramène. Ce quelque chose, c’est l’amour profond et inaltérable que j’ai pour l’improvisation.

L’impro, c’est plus qu’un simple hobby ou activité parascolaire. C’est une passion qui brûle en moi depuis des décennies, un feu qui refuse de s’éteindre. J’ai eu la chance de voir des générations d’élèves se transformer sous mes yeux, des novices timides en scène devenir des artistes confiants et créatifs. Chaque sourire, chaque éclat de rire, chaque moment de pure magie sur scène est gravé dans mon cœur.

J’ai tenté de prendre ma retraite plusieurs fois. J’ai essayé de me convaincre que mon temps était passé, que j’avais donné tout ce que je pouvais. Mais chaque fois que je vois une équipe en action, chaque fois que j’entends le public rire ou applaudir avec enthousiasme, je sais que je ne peux pas m’arrêter. L’impro est dans mon sang, c’est une partie de mon être que je ne peux simplement pas ignorer.

À chaque tentative de retraite, une véritable bataille intérieure s’engageait en moi. Il y a cette voix raisonnable qui me dit : « Il est temps de prendre du recul, de te reposer, de profiter de la vie sans les horaires chargés de répétitions et de matchs. » Mais juste après, une autre voix plus passionnée réplique : « Mais comment peux-tu abandonner ces jeunes qui comptent sur toi? Qui d’autre leur apprendra à improviser avec autant de cœur et de folie? »

Imaginez, pour un instant, une scène d’improvisation : Moi, debout au centre de la scène, déchiré entre deux personnages. D’un côté, l’Ancien Coach, en robe de chambre et pantoufles, tenant une tasse de thé fumante et prônant la tranquillité et les joies simples de la retraite. « Regarde-toi, » dit-il, « Tu as donné des années à ces jeunes. Il est temps de te reposer, de profiter de ta famille et de ta liberté. »

De l’autre côté, l’Improvisateur Passionné, vêtu de son gilet d’impro, débordant d’énergie et d’enthousiasme. « Comment peux-tu penser à partir? » s’exclame-t-il. « L’improvisation, c’est ton essence! Qui leur montrera comment transformer une erreur en un éclat de rire? Qui leur enseignera la magie de la spontanéité et de la création collective? »

Les répliques se fusionnent, les arguments s’entremêlent. L’Ancien Coach plaide pour la raison et le repos, tandis que l’Improvisateur Passionné évoque les moments inoubliables, les éclats de rire partagés, les triomphes. Chaque argument est un échange, avec des revers de situation, des punchlines et des moments de réflexion profonde.

L’improvisation, c’est la liberté d’expression à son état pur. C’est un espace où les jeunes peuvent explorer, expérimenter et se découvrir. En tant qu’entraîneur, j’ai l’opportunité de guider ces jeunes esprits, de leur montrer qu’il n’y a pas de limites à leur créativité. Voir leur progression, leur confiance grandir, c’est une récompense inestimable.

Je me souviens de la première fois que j’ai coaché mon propre fils, Parker. Ce fut une expérience unique, mélangeant fierté et défi. Voir ses progrès, son enthousiasme et sa passion pour l’impro m’a rappelé pourquoi j’ai commencé cette aventure en premier lieu. C’est dans ces moments-là que je réalise que je ne suis pas seulement un coach, mais aussi un mentor, un guide, un supporter inconditionnel.

L’improvisation m’a donné tant de joie, de rires et de souvenirs inoubliables. Chaque match, chaque répétition, chaque interaction avec les élèves, me rappelle pourquoi je ne peux pas me retirer. C’est une partie intégrante de ma vie, un pilier de mon existence.

Alors, même si j’ai essayé de dire au revoir à plusieurs reprises, je sais au fond de moi que je ne pourrai jamais vraiment partir. L’impro, c’est ma vie. Tant qu’il y aura des jeunes prêts à monter sur scène, à prendre des risques et à s’amuser, je serai là, prêt à les encourager, à les guider et à partager avec eux la magie de l’improvisation.

C’est une danse avec l’inconnu, une célébration de l’instant présent où chaque erreur devient une opportunité, et chaque silence, une chance de créer. La retraite pourrait signifier la fin de cette danse, et pour moi, c’est un rythme que je ne peux abandonner. La véritable beauté de l’improvisation réside dans sa capacité à nous rappeler que la vie elle-même est une improvisation, un jeu sans script où chaque moment est une chance de briller, d’apprendre et de partager. Tant qu’il y aura une scène et des âmes prêtes à s’y aventurer, je serai là, car l’impro ne connaît pas de fin, seulement des débuts sans cesse renouvelés.

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